Ettore SOTTSASS (1917 - 2007)
Le design comme poétique de l’incertitude.
Ettore Sottsass nait en Autriche en 1917, d'un père italien et d'une mère autrichienne. Sa famille rejoint ensuite l'Italie où, encouragé par un père lui-même architecte il entreprend des études d’architecture au Politecnico de Turin. Son diplôme en poche en 1939, Sottsass se positionne vite dans un rapport conceptuel et métaphysique à la création, influencé notamment par son ami le peintre abstrait Luigi Spazzapan. Ces réflexions continueront de l'habiter tandis que la 2nde Guerre Mondiale fait rage et, après l’Armistice, il s’installe à Milan. Là, il participe aux travaux de reconstruction et aux programmes de logements sociaux. Sottsass est cependant rapidement opposé à des contraintes matérielles et des orientations politiques préoccupées d’efficacité, qui empêchent la réalisation de ses idées socialistes de "logement pour tous, beauté pour tous" [1]. Convaincu que l’architecture ne peut "se décréter d’en haut", il décide d’y renoncer pour concevoir des "objets architecturés".
Il fonde alors son agence de design Milanaise en 1947, avant de partir pour New-York où il travaille entre autres au sein du cabinet George Nelson. Là-bas, il découvre "la culture industrielle, au sens anthropologique" qu’il oppose à son Italie des années 1950 où "si on voulait une table, il fallait aller chez le menuisier". Cette expérience le conforte dans l’idée de se concentrer sur le design industriel et, de retour en Italie, il entame en 1958 une collaboration avec l’entrepreneur Adriano Olivetti. Celle-ci durera un peu plus de 30 ans durant lesquels Sottsass – pourtant embauché comme designer du nouveau département d’électronique - est laissé libre d’expérimenter dans la création de meubles, de bijoux ou de céramiques, tout en continuant à dessiner sans cesse. Et au sein du département d’électronique, donc, Sottsass participe en 1957 à la création d’ELEA 9003, le premier ordinateur italien qu’il traite comme un "paysage électronique". Avec une apparente simplicité et une approche ludique, il dessine des claviers et panneaux de contrôles masquant la machinerie et conçoit pour l'écran de la console une grille de cubes colorés, semblable à des carreaux de mosaïque gravés d'une lettre ou d'un symbole. Complexe mais élégante, la conception de l’ELEA 9003 lui obtient le prestigieux prix de design industriel Compasso d’Oro (Boussole d’or) en 1959.
Puis, au début des années 60, Ettore Sottsass devient directeur artistique chez Poltronova, éditeur de mobilier contemporain qui entend rénover la conception de l’habitat et expérimenter sur les matériaux et les formes. Il fait alors deux voyages qui bouleversent son rapport à la création. L’Inde d’abord, où il découvre l’omniprésence de la couleur et un rapport à la mort qui bouleverse sa vision du monde. Puis les États-Unis où il retourne pour se faire soigner d’une grave maladie rénale et est frappé le Pop Art, qui questionne la société de consommation. Il rencontre dans le même temps les poètes et écrivains de la Beat Generation, rebelles en quête d’une nouvelle spiritualité car conscient d’être "d'une façon non dramatique, au pied de leur propre mur"[2]. De ces expériences naissent (entre autres) ses Céramiques des ténèbres - en 1963 - puis ses Céramiques des lumières - en 1964 - dans une démarche inspirée de la culture orientale où l’objet est un support de contemplation et de recueillement.
Sottsass est alors proche du mouvement radical de l’Anti-design, dont il publie les débats et réflexions anticonsuméristes dans sa revue Pianeta Fresco à partir de 1968. Il continue à dessiner et créer des formes nouvelles, dans une démarche où les questionnements politiques et sociaux sont de plus en plus centraux. C’est dans cette optique qu’il présente en 1972 ses « meubles containers », au sein de l’exposition du MOMA de New York "The New Domestic Lanscape". Issus de sa réflexion sur un nouveau mode de vie, une nouvelle manière d’habiter et une nouvelle société, ces meubles résultent en une série de modules sur roulettes, bon marché et peu esthétiques mais contenant chacun une activité de la maison (douche, toilette, rangement, cuisine ...). Le but de Sottsass est ici de suggérer une nouvelle façon d’habiter parmi des combinaisons infinies d’éléments modulaires plutôt que dans la structure rigide d’une construction articulée autour d’eux.
En 1979, Ettore Sottsass collabore avec le "laboratoire pour une iconographie nouvelle"[3] qu’est le groupe Alchimia et sa production toute en dérision de l’héritage fonctionnaliste. Il crée notamment une table qu’il baptise Le strutture tremano (Les structures tremblent), formée par un plateau de verre posé sur un piétement tubulaire en zigzag. Créées en séries limitées et volontairement hors du circuit de la production de masse, les pièces que Sottsass réalise avec Alchimia annoncent l’idée d’un "Nouveau Design" (Nuovo Design) et la naissance corolaire du Groupe Memphis qu’il fonde en 1981, à l’âge de 64 ans.
En 1985, Sottsass quitte Memphis pour se concentrer sur sa propre agence d’architecture, de graphisme et de design : Sottsass Associati. Il y travaille entre autres collaborateurs avec d’anciens membres du Groupe Memphis, le designer industriel James Irvine ou l’architecte Johanna Grawunder. Sa fin de carrière est un retour aux sources : faire de l’architecture. Sottsass Associati comptera parmi ses clients de grandes entreprises et une clientèle internationale et prestigieuse.
Du design industriel à l’artisanat, l’œuvre d’Ettore Sottsass est un jalon dans l’affirmation de l’esthétique post-moderniste et une réflexion sur un design qui n’asservirait pas l’homme à l’objet. Ainsi qu’il l’affirma :
“Le devoir des artistes doit être d’indiquer les chemins de la fantaisie, de la surprise, de l’indépendance”.
[1] Selon ses termes dans un entretien au journal Le Monde publié le 29 aout 2005
[2] Selon les termes de Jack Kerouac dans un entretien avec le New York Times en 1952.
[3]Suivant les termes d’Alessandro Mendini, le fondateur du groupe Alchimia
Ettore Sottsass : prix et cote
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Ettore Sottsass (1917-2007) est un architecte et designer italien notamment connu pour avoir fondé le groupe Memphis. Découvrez dans cet article sa biographie et sa place sur le marché de l’art.
Notre équipe, composée d’experts et de commissaires-priseurs, est à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.
Selon l’entreprise française de cotation du marché de l'art, Artprice, les œuvres d’Ettore Sottsass se vendent principalement sur les marchés français, italien, anglais et américain. La catégorie artistique la plus recherchée par les collectionneurs est le mobilier (à 45% contre 30% pour les objets et 12% pour les sculptures et volumes).
Pour le moment, le record de ventes d’Ettore Sottsass est décerné à la sculpture en céramique et en bois stratifié intitulée “Menhir della Vita” et réalisée en 1966. L'œuvre exécutée par Bitossi - Montelupo Fiorentino et mesurant 2,337 mètres de haut, s’est vendue 630.523 € lors d’une vente aux enchères organisée à New-York en 2023.
Dans la catégorie mobilier, l'œuvre la plus chère vendue à ce jour est “Composition d'éléments en bois colorés et en miroir, le tout reliés par des cordes de chanvre”, conçue pour la Galleria Arform à Milan en 1959. L'œuvre exécutée par Brugola en Italie, en pin peint, verre miroir et chanvre s’est vendue 287.306 € lors d’une vente aux enchères à Londres en 2018.
A Paris cette fois, dans la catégorie objet, le totem "Flavia" en faïence de 1996 a atteint les 92.000 €. Aucun objet en céramique de l’artiste n’a pour le moment dépassé l’enchère.
Exemples de prix par catégorie pour des oeuvres d’Ettore Sottsass selon Artprice :
Catégories | Estimations moyennes* | Estimations hautes** |
Sculpture & Volume | 65.290 € | 630.523 € |
Mobilier | 6.871 € | 287.306 € |
Luminaire | 42.919 € | 163.838 € |
Céramique | 4.430 € | 147.942 € |
Objet | 4.540 € | 92.000 € |
Tapisserie | 1.681 € | 13.656 € |
Dessin & Aquarelle | 2.400 € | 24.000 € |
Estampe & Multiple | 342 € | 9.000 € |
*Estimations moyennes en 2023. **Prix records réalisés par catégorie.
La maison de ventes aux enchères MILLON se voit régulièrement confier des œuvres d’Ettore Sottsass. Ces dernières atteignent de beaux prix grâce au travail rigoureux de nos experts et à la visibilité des ventes sur le marché de l’art français et international.
Critères pour estimer le prix d’une oeuvre d’Ettore Sottsass
L'estimation du prix d'une œuvre d'Ettore Sottsass implique plusieurs étapes clés. Tout d'abord, il est essentiel d'authentifier l'œuvre et de tracer sa provenance. La présence d'une signature authentique, de marques de fabrication et de certificats d'authenticité peut augmenter considérablement sa valeur, surtout si l'œuvre a appartenu à une collection reconnue.
Ensuite, l'état de l'œuvre est crucial : les pièces bien conservées, sans dommages ni réparations, sont plus prisées sur le marché.
La rareté et la désirabilité de l'œuvre jouent également un rôle important ; les œuvres uniques ou en édition limitée sont généralement plus précieuses, surtout si elles sont actuellement en vogue.
Il est également important de se référer à l'historique des ventes d'œuvres similaires pour déterminer une fourchette de prix réaliste. Par exemple, si un bureau "Synthesis 45" de Sottsass s’est récemment vendu à un certain prix, cela peut servir de référence.
L'importance culturelle et historique de l'œuvre, en particulier son rôle dans le mouvement Memphis et la carrière de Sottsass, peut aussi influencer sa valeur. Par exemple, les pièces de la première collection Memphis sont souvent plus valorisées.
En outre, la demande actuelle pour les œuvres de Sottsass peut fluctuer en fonction des expositions récentes, des publications et des événements liés à l'artiste.
Enfin, la taille et les matériaux utilisés dans l'œuvre sont des facteurs à considérer : une grande œuvre réalisée avec des matériaux coûteux aura probablement une valeur plus élevée qu'une petite œuvre en matériaux moins nobles.
Tous ces éléments combinés offrent un cadre pour l'évaluation de manière approfondie et précise la valeur d'une œuvre d'Ettore Sottsass. Cependant, rien ne remplace l'avis d'un expert pour obtenir une estimation précise et actuelle.
Oeuvres d’Ettore Sottsass adjugées chez MILLON
Ettore SOTTSASS (1917 - 2007) "Carlton", création de 1981 Édition Memphis Milano. Meuble de séparation faisant étagère ou bibliothèque à structure en bois recouvert de mélaminé polychrome. Plaquette métallique "Memphis Milano 1981 E.Sottsass Made in Italy" en partie basse. 198 x 190 x 40 cm (quelques rayures). Adjugé 12.000 € chez MILLON.
Ettore SOTTSASS (1917-2007) & BACCARAT - coupe modèle Ki de forme hémisphérique en cristal bleu nuit et cristal transparent à décor de frises géométriques, base et fût de forme hexagonale Signée Sottsass et Baccarat et numérotée 11/29 27 x 39,5 x 39,5 cm.
Ettore SOTTSASS (1917 - 2007) "Casablanca", bibliothèque ouvrant à un abattant, trois tiroirs coulissants et deux vantaux, à structure en bois plaqué de stratifié polychrome et base en bois noirci. Plaquette métallique "Memphis Milano 1981 E.Sottsass Made in Italy" en partie basse. 232 x 150 x 35 cm. Adjugée 6.000 € chez MILLON
Ettore SOTTSASS (1917-2007), BITOSSI éditeur, Spectaculaire vase "Articolo 6000" en faïence de la collection "Hollywood", 1991, haute base hexagonale émaillée bleu marine, soutenant divers éléments émaillés vert et bleu pâle, terminé par un haut col cylindrique jaune, bagué de blanc, couronné d'un anneau. Adjugé 4.600 € chez MILLON
Ettore SOTTSASS (1917-2007) "Totem Menta" Editions "Galleria Modernariato" Sculpture en céramique vernissée polychrome. Signée "Sottsass" et numérotée. H : 58 cm. Adjugée 4.500 € chez MILLON
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