L'école des Beaux-Arts de l'Indochine, une oeuvre de Le Van De

Lorsque Lê Văn Đệ vient au monde à Mỏ Cày (Bến Tre) dans le Delta du Mékong le 28/8/1906, la Cochinchine est déjà une colonie française. Issu d'une riche famille de propriétaires terriens, il se montre doué en dessin depuis sa plus tendre enfance. Il obtient le diplôme d'étude primaire supérieur du lycée Lasan Tabert de Saïgon en 1925 et son père le destine à la voie du Droit ou de la Médecine alors qu’en lui bouillonne une toute autre idée : s'aventurer sur le chemin des Beaux-Arts. Cette pensée ardente est confortée par la création à Hanoï de l’École des Beaux-Arts de l’Indochine.

Lê Văn Đệ sait que les écoles d'Arts Appliqués de la Cochinchine forment avant tout des artisans alors que lui-même se voue aux Beaux- Arts. Il se fait aider par Huỳnh Đình Tựu, alors Directeur de l'école de Gia Định, qui lui enseigne la peinture en vue de concourir à l'examen d'admission à l’École des Beaux-Arts de l’Indochine. Reçu 7e parmi 10 lauréats de la première promotion, Lê Văn Đệ en sort premier au terme de cinq ans d'études, en 1930.

 

Victor Tardieu le qualifie en ces termes : "Le major de la promotion LE VAN DE qui est un garçon sérieux qui s’exprime correctement en français et a été durant ces dernières années le délégué général, élu par ses camarades de l’internat Bobillot-Sud". 

Lê Văn Đệ participe en tant qu'élève de l’École des Beaux-Arts de l’Indochine à l'Exposition Coloniales de Paris 1931, avec le tableau "Les bords du fleuve Rouge", considéré par Adolphe Tabarant du journal l'Œuvres comme "l'harmonisation d'un style d'estampe japonaise et de post-impressionnisme"...

 

À la suite d’un accord spécial, les œuvres qui n'ont pas d’acheteurs à l'Exposition Coloniale sont exposées à l’Agence Économique de l’Indochine (AGINDO), dans l’attente d’en trouver un.

Selon la lettre de Blanchard de la Brosse, alors directeur de l'AGINDO, à Victor Tardieu, daté le 21/12/1932, il y a 2 peintures à l'huile de Lê Văn Đệ : "Les bords du fleuve Rouge", et une autre dans un format plus petite "Barques sur le fleuve Rouge", vendues à cette époque.

La peinture à l'huile aujourd'hui présentée est "Les bords du fleuve Rouge".

 

Lot 8

LE VAN DE (1906-1966)

Les bords du fleuve Rouge / Đôi bờ sông Hồng, 1930

 

Ce lot sera disponible lors de la vente du 24 juin 2022 à 14h00 aux salons du trocadero.

Notons le format makémono de ce tableau illustre déjà le sujet : le fleuve rouge, aux environs de Hanoï. Nous sommes évidemment loin de ce qu’est aujourd’hui cet endroit ! 

Sur ce tableau règne l’immensité, celle des eaux du fleuve, celle de la terre environnante qui paraît bien désertique encore.

Au premier plan apparaît un village de pêcheurs. Ceux-ci sont les seuls, à cette époque, à habiter ces endroits. Ils y ont construit des maisons sur pilotis qui semblent ainsi flotter telles des embarcations.

L’apparente monochromie de ce tableau dit à sa manière comme l’impossible faculté à tout appréhender dans un tel paysage, invitant le spectateur à une grande humilité ou peut-être à une plus grande attention ?

On peut y découvrir quelques personnages habitant ce lieu ; remarquer l’un d'eux coiffé d’un chapeau conique et tous habillés de tenues traditionnelles. Il y a ces passerelles de bois reliant la terre ferme aux maisonnées. Plus en profondeur, une barrière de rochers sans doute, protège ces dernières de possible montée des eaux. Plus loin des bateaux, certains amarrés, un autre en pleine eau attire le regard comme une invitation 
à le suivre.

En bas, à gauche, on trouve la signature de Lê Văn Đệ et la date 1930. Il faut remarquer ainsi que l’auteur a mis en œuvre dans cette toile une technique de perspective encore peu connue en art asiatique, qui incite bien le regardeur à entrer dans l’œuvre et partir à sa découverte...