Précurseur de l’art abstrait en Tunisie et un des pionniers de l’art moderne en Afrique du Nord. Après une formation classique à l’Ecole des Beaux-Arts de Tunis, il suit les cours de l’Ecole nationale de Paris de 1948 à 1951, années durant lesquelles il approchera l’abstraction à travers les œuvres de Pollock et Twombly. Rentré en Tunisie en 1956, il y enseignera le dessin. Membre de l’Ecole de Tunis, il organise deux expositions personnelles (1956, 1963) et figurera dans diverses expositions collectives avec l’Ecole de Tunis à Tunis et à l’étranger (Milan, 1964).
« Choquante et surprenante » seront les adjectifs employés par un critique local lors de sa visite de l’exposition Zitoun de 1963, l’abstraction quasi-inconnue en Tunisie alors, en est à ses balbutiements. L’exposition, « controversée, discutée... », rompant les codes du formalisme, fut un déclic pour lui, le public ne saisit pas la portée de son art et n’accroche pas à son univers. Incompris, tourmenté et sans doute fâché avec l’Ecole de Tunis, sa génération « opposait ses angoisses et ses incertitudes à la calme assurance des artistes de l’école de Tunis » in l’art contemporain en Tunisie, les enjeux sociaux et internationaux, thèse de doctorat, Khadhraoui Awatef, Université Paris X, 2013, il quitte la Tunisie en 1964 et s’installe définitivement en France, suivant les pas d’Edgard Naccache (autre précurseur de l’abstraction en Tunisie) deux ans plutôt, où il connaitra une seconde carrière devenant un pilier du mouvement abstrait parisien.
Interrogé sur son changement de mouvement artistique, Gilbert Zitoun répondra : ‘Pourquoi le changement ? « […] qu’il n’a pas changé. Mais tout simplement, a développé un langage encore timide il y a quelques années ». Toujours dans le même article il définit son art ainsi : « L’abstraction […] permet de traduire, de décrire, de dépeindre et de peindre avec une rare précision les moindres états d’âmes, […], elle peut exprimer, un cri, un murmure, une prière. » in La Presse, 5 novembre 1963, c’est dire qu’il s’abstrait à une mise à nue. L’œuvre présentée, en est une parfaite démonstration.
La composition, datée de 1965 mais sans doute entamée en octobre 1964, dépeint les tourments de l’artiste d’un point de vue professionnel et personnel. Exécutée en France, elle représente un champ d’oliviers, personnifiant l’artiste (Zitoun signifiant oliviers en arabe), dont les troncs sont carbonisés par un soleil ardent, celui de sa terre natale, sur un fond gris, allégorie du mal être de l’artiste qui a brulé toutes ses toiles avant de quitter son pays.
Elle n’est pas sans rappeler deux toiles abstraites qu’il a exposé en 1963 au salon de l’Ecole de Tunis qualifiée « d’escarbilles noires et rouges d’une hallucination inquiétante » in « Chronique Artistique. « L’Ecole de Tunis », Le Petit Matin, 10 mars 1963.