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Georges JOUVE- 1910-1964

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"Plus les moyens sont limités, plus l'expression est forte"[1]

 

Georges Jouve naît en 1910 à Fontenay-sous-Bois, dans une famille de décorateurs qui encourage ses inclinaisons artistiques. À 17 ans, il s’inscrit à la prestigieuse École Boulle où il apprend l’histoire de l’art et se forme au métier de sculpteur. C’est durant ces années d’études qu’il acquiert le surnom d’Apollon, qu’il conservera. Diplômé en 1929, Jouve continue à se former en suivant les cours de plusieurs académies libres de peintures (Jullian et Grande Chaumière notamment).

Après avoir débuté une carrière de décorateur de théâtre, Jouve est mobilisé lors de la deuxième Guerre Mondiale. Emprisonné par les Allemands, il s’évade en 1943 et retrouve ses origines méditerranéennes en partant se réfugier à Dieulefit (dans la Drôme) jusqu’à la Libération. C’est là qu’il découvre l’art de la céramique, auprès notamment du céramiste Étienne Noël, chez qui il fabrique des objets décoratifs et des figurines religieuses inspirées des Santons.

Jouve retourne à Paris en 1944 et installe son atelier rue de la Tombe-Issoire.

Là, l’artiste s’éloigne vite de la poterie traditionnelle, renonçant au travail au tour pour modeler à la main des créations, qui deviennent de véritables sculptures abstraites, rythmées par un sens unique des volumes et des couleurs. Parmi elles et notamment, l’artiste est célèbre pour son noir mat qui vient habiller de profondeur et de sensualité des formes minimalistes et d’une grande puissance évocatrice. Il expose dans différentes galeries et participe régulièrement aux Salons de l'Imagerie - dont il fut membre du Comité-directeur - et des Artistes Décorateurs dont il est sociétaire.

Dans les années 50, son style résolument moderne et atypique vaut à Jouve de collaborer avec plusieurs ensembliers et décorateurs parmi lesquels Jacques Adnet ou Mathieu Matégot. En 1953 cependant, l’artiste se découvre atteint de saturnisme suite à sa lente intoxication au plomb contenu dans ses émaux. Il part se reposer en Bourgogne avec son épouse, avant de quitter définitivement Paris en 1954 pour s’installer à nouveau dans le Sud : à Pigonnet, dans la région d’Aix. Il s’y rétablira et se liera d’amitié avec les céramistes du groupe de l'École d'Aix (parmi lesquels René Ben Lisa, Carlos Fernandez ou Jean Amado). Son style continue alors à évoluer vers une céramique plus épurée et minimaliste, aux tonalités solidement monochromatiques mais profondes : jaunes ou verts prairie, oranges lumineux, noirs luisants, blancs crémeux.

En 1956, Steph Simon ouvre sa Galerie de mobilier (aménagé par Charlotte Perriand) et y défendra le vase "Cylindre" de Georges Jouve jusqu’en 1974, date de fermeture de la boutique.

En 1959, Jouve expose son travail à la galerie La Demeure de Denise Majorel.

Après le décès de l’artiste en mars 1964, la galeriste lui dédiera en 1965 une vaste rétrospective "Hommage à Jouve, 20 ans de céramique".

Virtuose de la céramique, Georges Jouve était de ceux qui ne séparaient pas l’usage de la décoration, ni l’utilité de la beauté. Toujours fidèle à sa vision des arts du feu, cet homme unanimement reconnu pour sa gentillesse et sa passion demeure aujourd’hui un des maîtres de la céramique contemporaine. 

 


[1] Pierre Soulages dans son entretien avec Jean Pierrard in "Le Point" n°1585 du 31 mars 2003.

 

 

Oeuvres de Georges JOUVE

La maison de ventes aux enchères MILLON vend régulièrement des œuvres de Georges Jouve. Florian Douceron, clerc spécialiste du département département Arts Décoratifs du XXe siècle, vous décrypte des œuvre phare de l'artiste :

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Georges JOUVE : lampe en faïence émaillée noire adjugée 75 000 euros lors de la vente aux enchères "Masters" organisée par le département Arts Décoratifs du XXe siècle

 

"Tout dans la nature se modèle sur la sphère, le cône et le cylindre, il faut apprendre à peindre sur ces figures simples, on pourra ensuite faire tout ce qu’on voudra."[1]

 

À l'aune de cette citation, notre lampe prend une dimension Cézanienne dans son asymétrie organique, composée de figures simples dont les courbes pleines semblent circonscrire le vide.

Sa forme nous évoque un cairn qu’un caprice anachronique du potier aura transformé en balise domestique pour lier le temps et l’espace sous la lumière qu’elle abritera. Un tumulus de terre habillé du noir intense et satiné caractéristique de l’ascèse esthétique de Georges Jouve dont le minimalisme évoque "l’étrange luxe du rien"[2].                          

Sous sa surface d’un noir de jais, la forme épurée et sculpturale modelée par l’artiste créé des reflets changeants au contact de la lumière. Cette lampe incarne alors toute la dimension alchimique de l’Art du Feu qui transforme en noir l’oxyde de plomb, qui fait du métal une non-couleur vibrante, "une couleur en soi, qui résume et consume toutes les autres"[3].

 


[1] Paul Cézanne dans une lettre à son ami le peintre Émile Bernard en date du 15 avril 1904.

[2] que voyait François Mauriac chez Jean-Michel Frank in Art et Médecine, octobre 1932, page 38.

[3] Henri Matisse in "Ecrits et propos sur l’art, 1946.

 

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Coupes, soupière et lampes de Georges Jouve présentées lors d'une vente aux enchères "Masters" organisée par le département Arts Décoratifs du XXe siècle :

 

"Que la poterie dût répondre un usage il était bien d’accord, mais réduire l’intérêt des choses à une fonction immédiate lui aurait paru un peu bref. Bien sûr, il se préoccupait aussi de l’utilité, mais d’une utilité supérieure dont le terme serait la beauté. Jouve témoigne qu’un objet beau est utile dans la mesure où il est beau et qu’il devient alors nécessaire dans un certain mode de vie. Beau c‘est-à-dire doué de certaines proportions, d’une matière qui lui est propre et aussi de cette qualité mystérieuse à laquelle il tenait tant, la vie silencieuse qui continue d’animer les objets."[1]

 

Avec son corps cylindrique habillé du noir signature de Jouve, la soupière est à rapprocher des séries à l’esthétique minimaliste des vases "Boules" ou "Pomme" que le céramiste décline du milieu des années 50 aux années 60. A l’instar de ces vases, notre soupière présente non pas un goulot mais une prise étirée et décentrée, toute en rupture avec une perfection axiale qui serait tout sauf naturelle. En effet et ainsi que nous le rappelle Daniel Penac[2] : 

"La nature a horreur de la symétrie, elle ne commet jamais cette faute de goût".

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Soupière de Georges Jouve présentées lors d'une vente aux enchères "Masters" organisée par le département Arts Décoratifs du XXe siècle :

Sans doute légèrement antérieures les coupes, délicatement asymétriques elles aussi, affirment plus encore ce désir de processus immédiat que trouvait Jouve dans la céramique. Une immédiateté créatrice limitée au seul façonnage des pièces cependant, la part restante relevant d’une ascèse proche du Zen à composer avec l’incertitude de l'action du feu. Il en ressort des pièces à la simplicité émouvante, dont les surfaces semblent laquées sous leurs reflets presque métalliques.

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Georges JOUVE : coupe en céramique émaillée noire adjugée 4 700 euros lors de la vente aux enchères "Masters" organisée par le département Arts Décoratifs du XXe siècle

A contempler ces pièces, la somme de travail, de recherches et d’essais que concéda Jouve à sa pratique de la céramique nous échappe tant leur résultat a un caractère d’évidence. Il convient cependant de se souvenir avec Brancusi[3] que "la simplicité est la complexité résolue", et avec Isamu Noguchi qui comme Jouve fût défendu par la Galere Steph Simon que :

 "Les attraits de la céramique résident en partie dans ses contradictions. C’est à la fois difficile et facile, avec un élément indépendant de notre volonté. Comme la peinture à l’encre "Sumi", elle ne se prête pas aux ratures et à l’indécision."[4]
 


[1] Norbert Pierlot in "Monsieur Jouve", Georges Jouve, Jousse entreprise éditions, 2005, page 14.

[2] in Journal d'un corps, Editions Gallimard, 2014, page 234.

[3] in The Essence of Things, Gimenez, Carmen and Matthew Gale éditeurs, page 19.

[4] traduit de l’anglais, in Caroline Tiger : Isamu Noguchi, Chelsea House Publishers, 2007, page 93.

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Adjugé à 4 000 €

JOUVE (Paul) & LOTI (Pierre).

Lot 532

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